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Huîtres : ouvrez le banc

Les écaillers de la capitale les appellent familièrement les « mâcheurs » ou les « gobeurs », selon que les clients des grandes brasseries parisiennes ont un faible pour les huîtres spéciales plus charnues ou optent pour les fines de claire, plus légères et translucides. Les premiers sont réputés fins connaisseurs, alors que les seconds ne feraient qu’avaler l’huître sans y mettre le moindre coup dent, au risque de susciter la réprobation de ceux qui se considèrent comme les vrais amateurs. Bon an mal an, deux Français sur trois mangent des huîtres régulièrement ou occasionnellement, avec un pic de consommation au moment des fêtes de fin d’année. Creuses ou plates, spéciales ou fines de claire, très iodées ou, au contraire, plus douces, bretonnes, vendéennes ou charentaises, les huîtres sont marquées par leur terroir et leur méthode d’élevage. Certains ne jurent que par les Marennes-Oléron de la maison Gillardeau, d’autres préfèrent les huîtres de Charente de David Hervé ou celles d’ Arcachon de Joël Dupuch, ou encore celles de l’étang de Thau de Florent Tabouriech. Est-ce un effet des prix de détail qui peuvent sembler élevés (de 15 à plus de 30 euros la douzaine à Paris) et de la crise conjuguée? Le réseau de distributeurs souffre, victime d’une baisse des ventes en volume de 15 à 35 % ces cinq dernières années. Seulement un tiers de la production passe aujourd’hui par les bancs d’écaillers de la restauration alors que les plus gros volumes sont vendus par la grande distribution, les poissonneries et le circuit de vente directe. Dans la restauration, ce coquillage semble devenir peu à peu la chasse gardée des grandes brasseries et des restaurants spécialisés dans les produits de la mer ou encore de la haute gastronomie. Souvent incriminés par les petits restaurateurs, les perspectives de rentabilité qui seraient faibles, les prix élevés des produits haut de gamme, ainsi que les difficultés de mise en oeuvre sur un marché où les bons écaillers se font de plus en plus rares ! « Je ne comprend pas vraiment les raisons de ce phénomène de désaffection des petites et moyennes brasseries pour l’huître, regrette Yvon Madec, producteur à Prat-Ar-Coum. Parmi tous les produits de la mer, l’huître reste pourtant un des plus abordables au niveau des prix. » Le best-seller de la maison Madec, c’est la spéciale n° 2, particulièrement adaptée à la forte demande parisienne, une huître bien charnue et iodée avec une bonne longueur en bouche. Le fruit de la douceur des abers (estuaire côtier) qui a trouvé sa place sur la table de Guy Savoy, Pierre Gagnaire ou encore Jacques Le Divellec, et qui peut voyager jusqu’à Tahiti ou en Chine selon la demande! Imposer leur marque, c’est le rêve de beaucoup de producteurs impressionnés par la réussite des locomotives du secteur qui tirent la qualité vers le haut. « Nos huîtres ne sont pas banales. Elles racontent une vraie histoire. Chez moi, on reste sur le qualitatif et la valorisation du produit et je serai ravi de travailler avec les brasseries parisiennes », assure Yvon Madec.

Trois questions à Frantz Mussard, chef écailler de l’auberge Dab à Paris

Comment construit-on une carte de fruits de mer pour une grande brasserie parisienne?
On cherche d’abord la région de production : Bretagne, Charente, Normandie, et d’année en année on affine l’offre en conservant les produits qui marchent le mieux et en écartant les autres. En fait, une carte va se construire sur plusieurs années. À l’auberge Dab de la Porte Maillot, nous avons actuellement une dizaine d’huîtres référencées sur notre banc. Mais les plus demandées chez nous sont les Gillardeau et les huîtres du Cap-Ferret. Les belons, très difficiles à élever ont également leurs amateurs.

Quelles sont les demandes les plus fréquentes de vos clients?
Beaucoup de nos clients choisissent une de nos trois formules plateau de 35 à 76 euros (dégustation, plateau de l’auberge, plateau prestige). Mais une fois sur deux, c’est le client qui compose lui-même son plateau. Certains ne viennent d’ailleurs que pour cela. Ils vont opter pour 48 Gillardeau ou même jusqu’à 6 douzaines de fines de claire! D’autres prennent un homard, 6 spéciales, 6 fines de claire, 6 creuses de Bretagne. Mais nous vendons aussi fréquemment des huîtres à la pièce, par deux, trois ou quatre, comme mise en bouche avant le plat principal. Environ 10 % de nos ventes de coquillages sont constituées par la vente à emporter.

Vous avez plus de vingt ans de métier comme écailler. Comment voyez-vous évoluer l’offre de fruits de mer et votre activité dans les restaurants parisiens?
À la Porte Maillot, nous avons traditionnellement une belle offre avec l’auberge Dab, les brasseries Le Congrès et Sébillon. Mais, globalement, on constate que les bancs d’écailler se font plus rares dans les rues de la capitale. Les autorisations administratives sont compliquées à obtenir et les bons écaillers, capables de renseigner les clients plus exigeants compte tenu des prix, sont malheureusement de plus en plus difficiles à trouver.

L’Auvergnat de Paris

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